Le Prince Harry (BE)

A Toxcity, sous la menace permanente d'une pluie radioactive, des enfants moustachus jouent dans des bacs à cailloux entre les mégots et les seringues encore tièdes.

Dans les rues désertées de toute forme de vie vaguement civilisée résonne une musique étrange, épileptique, discordante, qui fait battre les veines comme une trace de 20 kilomètres, irrésistible comme une bière éventée un lundi matin.

Au fond d'une cave moisie, deux dipsomanes mongoloïdes torturent des synthés analogiques, défoncent une boîte à rythmes et harcèlent une basse sur fond de clameurs incongrues.

Un public édenté de marginaux sans revenu, yeux révulsés ou pupilles dilatées, suant des litres de toxines glisse plutôt qu'il ne danse entre les flaques de vomissures ensanglantées et les rats.

210 bpm. La rythmique électronoïde soutenue ne laisse aucun moment de répit. Les lignes de basse et de synthés distordues provoquent des visions perverses de parades amoureuses, les riffs tranchent comme un rasoir à travers un globe oculaire et la voix attardée annonce sans discontinuer l'imminence de la fin des temps.

C'est envoûtant, écouter un morceau de plus c'est se préparer à danser sur les ruines de ce monde et de vivre ce jour comme si c'était le lendemain du dernier.